vendredi 4 janvier 2019

Le déménagement

Bon reprenons où nous en étions... vous avez suivi le changement vers le CAJ, l’auxiliaire de vie, l’accueil temporaire à la MAS... C’était déjà pas mal tout ça non ? 

 Une petite organisation nickel : 
- Le lundi soir l’auxiliaire venait me chercher au CAJ et me ramenait à la maison et s’occupait de moi jusqu’au coucher. Bon ok ensuite il fallait que quelqu’un prenne le relai pas trop tard (genre 19h, 19h30) pour qu’elle puisse se barrer. Bon d’accord, ça obligeait souvent maman à s’organiser pour rentrer suffisamment tôt ou prévoir que Blondie soit là. Pas simple tous les jours mais ça le faisait (la laisser pas faire sinon elle va encore se plaindre...) - Le mardi papa ne bosse pas donc il s’occupait de moi. - Le mercredi le taxi me récupérait au CAJ et m’emmenait à la MAS où je restais le jeudi et le jeudi soir l’auxiliaire venait me chercher à la MAS. - Le vendredi maman venait me chercher à 13h et restait avec moi l’après-midi. 

Bref. Une bonne petite organisation. Ok dès qu’il y avait un tout petit grain de sable c’était le bordel mais globalement on s’en sortait pas mal. 

Alors pourquoi ? Pourquoi il a fallu qu’on la change ?

Ok je vous explique... Papa et maman avait toujours en tête qu’il fallait me trouver un foyer d’hébergement pour dans quelques années. Ils trouvaient que ce serait mieux pour moi, pour eux et surtout pour Blondie. Bah oui... s’ils avaient un accident du genre mortel, Blondie se retrouvait pas avec moi sur le dos et pouvait dilapider son héritage tranquillou sans avoir à me gérer.

Donc ils en avaient déjà visité quelques un et c’était jamais le foyer de bisounours que maman cherchait. Alors en désespoir de cause, ils s'étaient dits qu’ils allaient me mettre sur liste d’attente pour intégrer la MAS où j’étais en accueil temporaire. 

10 ans ... Ouais vous avez bien lu. 10 ans d’attente pour intégrer un foyer dans ma région. Nickel... Mais bon. Pas trop le choix. Donc ils en étaient au stade où ils allaient remplir le dossier pour la liste d’attente. 

 Tout ça c’était sans compter sur ce coquin de sort ...

En mars, mon éducatrice référente appelle maman.
Et lui raconte qu’un nouveau foyer vient d’ouvrir.
A 40km de la maison.
Un foyer tout neuf. 
Avec que des jeunes. 
Avec un niveau de handicap à peu près comme le mien. 
Avec la possibilité de venir me chercher quand ils veulent et pas uniquement 3 ou 4 week-ends par an. 

Et surtout avec une place libre. Mais avec une place libre rapidement. 
Bah oui.. qui dit place libre dit pas de rentrée d’argent pour cette place et dit donc perte d’argent. Donc ils voulaient trouver quelqu’un rapidement. Et donc si papa et maman étaient intéressés il fallait le dire rapidement. 

Donc du jour au lendemain on passait de 10 ans d’attente à 1 ou 2 mois. Ça a un peu retourné papa et maman. Le côté paradoxal entre : 
- « c’est génial »
- « on n’est pas prêts »
- « mais le sera-t-on jamais ? »
- « qu’est ce qui est le mieux pour tout le monde ? »
 Le tout en essayant en parallèle de préserver Blondie qui avait un concours en mai. 

Ils ont réfléchi et se sont dits que s’ils laissaient passer la place, elle se représenterait sûrement pas de sitôt (sauf grave épidémie de trucquitue aiguë au foyer).

Ils ont dit oui pour visiter et que je sois en compétition avec 2 ou 3 autres pour la place. Ils ont visité. Et ont trouvé que c’était presque un centre de bisounours. 

Presque. Parce que maman s’est dit que finalement ça devait pas exister les centres de bisounours. 
Et que surtout, au pays des bisounours ben devait pas y avoir d’handicapés ni de malades et donc pas de décision de merde à prendre comme ça. Mais bon. Ils ont dit oui quand même. 

Et finalement au foyer ils ont choisi quelqu’un d’autre. Alors d’un côté papa et maman ont été déçus (j’avais raté mon 1er examen important) et de l’autre ils étaient contents parce que ça me poussait moins vite vers la sortie....

Presque fin de l'histoire... 
Presque, parce que notre ami le sort a encore ouvert sa grande bouche : le foyer a dit qu’une autre place allait se libérer. Mais on savait pas quand. 
Non non le résident n’était pas en phase terminale mais juste pas bien intégré au centre et il fallait que les parents trouvent une autre structure. 

Donc une place mais on savait pas quand. Ça pouvait être septembre, ou plus tard, ou même l’année prochaine. Pas facile pour se projeter tout ça.. Bref... papa et maman acceptent et décident de me mettre pour les vacances d’été en août en accueil temporaire dans ce foyer pour voir si ça pouvait coller et commencer à m’habituer. 

Et puis le 13 juillet, coup de fil du foyer. La place était libre. Ils avaient réorganisé les unités et pouvaient m’accueillir. Mais vite. En fait en août c’était plus de l’accueil temporaire. C’était un accueil définitif.

Moi comme d'habitude, j'ai pas tout suivi. J'ai à peine compris, quand, fin juillet, on a fait une fête pour moi au CAJ en me disant au revoir.
J'ai pas plus compris les larmes de l'auxiliaire de vie la dernière fois qu'elle a quitté la maison...

J'ai tout juste un peu compris quand toute la famille a commencé à acheter des choses en disant que c'était pour mettre dans ma "beeeeeeeelle chambre" au foyer.

Et quand elles m'ont emmenée début août pour aménager la chambre, j'ai pas trop vu les larmes de Blondie en visitant le foyer. Et surtout j'étais pas dans la voiture pour voir les larmes de Maman et Blondie quand elles sont reparties en me laissant.

Moi ça allait. 
L'endroit est plutôt chouette. Je rentre le week-end à la maison. Je crois que j'ai trouvé mon rythme. 

Maman pensait aussi qu'elle allait le trouver. Elle mentirait si elle disait que ça n'allait pas. Elle a juste inventé le concept de "culpalagement". Un savoureux mélange entre culpabilité et soulagement. Un truc normal a priori mais pas hyper confortable à vivre.
On va dire que c'est pas grave... ça lui passera...


Ou pas...